I. L'auteur.
1. Eléments biographiques.
PLATON est né en 428 et mort en 348 à ATHENES. Il est le rejeton d'une famille noble : son père, ARISTON, prétend descendre du dernier roi légendaire d'ATHENES ; sa mère PERICTIONE compte parmi ses ancêtres DROPIDE, ami de SOLON.
390. PLATON effectue son premier voyage en SICILE, par l'EGYPTE, CYRÈNE et l'ITALIE du sud. Il rencontre DENYS à SYRACUSE. Il se lie d'amitié avec le beau - frère de DENYS, DION1 .
Il embarque pour la GRECE. Il est fait esclave à EGINE où il faisait escale. Il est racheté par AMNICERIS de CYRÈNE.
388. Il achète à COLONE, au nord - ouest d'ATHENES, un gymnase et un parc contigu, site placé sous le patronage du héros légendaire AKADÉMOS.
L'Académie est une petite université ; elle durera jusqu'à sa fermeture en 529 après Jésus - Christ.
Sur le fronton de l'ACADÉMIE était inscrit la formule : "Nul n'entre ici s'il n'est géomètre".
387- 367. PLATON enseigne et écrit.
367. A la mort de DENYS l'Ancien, DENYS le jeune, son fils, monte sur le trône et propose à PLATON de mettre ses idées politiques en pratique. PLATON vient d'achever la République.
366. DENYS accueille PLATON, mais DION est exilé. PLATON est retenu un an à SYRACUSE.
361. Troisième voyage de PLATON à SYRACUSE, qui aurait mal se finir. ARCHYTAS de TARENTE fait pression sur DENYS pour laisser partir PLATON.
361 - 347. PLATON enseigne et écrit.
354. DION est assassiné, - ce qui met fin aux espoirs de PLATON de créer ou de voir créer une monarchie philosophique.
348. PLATON meurt sans avoir achevé son dernier ouvrage, consacré à la politique, Les Lois.
2. Un disciple de SOCRATE.
PLATON fut introduit, vers sa vingtième année (vers 407), dans le cercle des disciples de SOCRATE.
- 1. Qui est SOCRATE ? Fils du tailleur de pierre SOPHRONISQUE et de la sage - femme PHENARETE, citoyens athéniens de condition modeste, il vécut constamment à ATHENES de 470 à 399.
Sa vie est présentée par ALCIBIADE dans le Banquet2, par SOCRATE lui - même dans l'Apologie de Socrate, par PLATON dans le Phédon. Les autres sources sur SOCRATE sont XENOPHON, l'Apologie de Socrate et Les mémorables3, ARISTOPHANE4 , DIOGENE LAERCE5 .
Patriote, pédagogue, il lui fut intenté un procès par ANYTOS, MELETOS et LYCON, pour impiété et corruption de la jeunesse. Il fut condamné à mort, et pour cela à boire la ciguë6.
- 2. SOCRATE, l'homme qui n'a rien écrit. La réticence de SOCRATE à l'écrit est exprimé dans le PHEDRE7. SOCRATE est l'homme de la ville8.
A. Une mission lui fut assignée par l'oracle de DELPHES :
"Un jour donc qu'il [CHEREPHON] s'était rendu à Delphes, il eut le front de consulter l'Oracle et (...) de lui demander s'il y avait un homme plus sage que moi. Or, la réponse fut qu'il n'existait personne de plus sage !"
PLATON. Apologie de Socrate9.
SOCRATE se demande ce que peut bien vouloir signifier le dieu.
B. L'inscience socratique :
"Ainsi donc je ne suis précisément savant en rien (...)".
PLATON. Théétète. 150 d 10.
C. La maïeutique11 .
L'enseignement de SOCRATE est un enseignement qui questionne soit celui qui dit savoir sur ce qu'il sait, soit celui qui est présenté comme bien doué (CHARMIDE, THEETETE).
Trois étapes : la question, l'ironie, l'aporie.
A. La question cherche à délivrer l'interlocuteur de la réponse qu'il contient ;B. l'ironie (ironie vient de eïrôneïa : interroger) cherche à faire prendre à l'interlocuteur le recul nécessaire pour mesurer la valeur de sa réponse ;
C. l'aporie (ou : impasse) conclut la plupart des dialogues socratiques de PLATON : la réponse cherchée n'est pas donnée. L'essentiel est moins la réponse que le regard porté sur soi que demande l'examen socratique.
- 3. Ce qui fait l'originalité de l'examen socratique.
A. L'examen socratique ne change pas l'état du savoir ; il change la personne elle - même. L'ironie a fait comparer SOCRATE à un taon12 ou à une torpille13.B. L'examen socratique n'est pas changement de la personne par SOCRATE, mais changement de la personne interrogée par elle - même. Elle est un exercice spirituel.
C. "Connais - toi toi - même", la formule de l'oracle delphique s'applique à l'enseignement socratique.
3. PLATON et la politique.
- 1. La démocratie athénienne. C'est une démocratie directe qui se réunit à l'Ecclésia, qui exclut des délibérations, enfant, femmes, esclaves, et métèques14 .
- 2. PLATON dans son siècle. PLATON est né dans les années qui suivirent la mort de PERICLES. PERICLES porta ATHENES au sommet de sa puissance et de sa prospérité.
PLATON meurt pendant la guerre que les barbares macédoniens avaient entreprise contre les cités grecques et qui devaient aboutir à l'asservissement de la GRECE.
Un oncle de PLATON, CRITIAS, avait figuré dans la tyrannie des Trente.
- 3. Voyages et espoirs. PLATON a espéré installé à SYRACUSE le projet politique de la CALLIPOLIS élaboré dans La République.
II. Le projet de la République.
1. Le but de la République.
Le but de PLATON est - il d'écrire un livre de morale ou est - il d'écrire un livre de politique ?
Le titre du livre laisse place à ces deux interprétations : La République ou de la justice.
2. Comment PLATON procède.
- 1. Pour savoir ce qu'est un homme juste, il faut savoir ce qu'est un Etat juste15 .
- 2. Les deux thèmes sont unis : morale et politique sont étroitement dépendantes l'une de l'autre16 .
3. La Cité parfaite.
- 1. Trois parties de l'âme et trois parties de l'Etat. L'âme humaine est composée de trois forces : la raison ; le courage ; les appétits du corps (Rép. IV, 436 c). De même l'Etat est composé de trois classes de population : les chefs ; les gardiens ; les artisans et les laboureurs. Ces trois classes sont issues de trois races : les races d'or, d'argent, de fer (Rép. III, 415 a - d).
- 2. L'ordre. L'Etat platonicien est un Etat d'ordre, dans lequel les philosophes sont rois (République. V, 473 c).
- 3. Le but. Connaître et établir la justice.
III. Le livre I.
Le livre I ouvre le débat de la République : la définition de la justice. Il a l'originalité :
A. d'être un tableau vivant : la situation est campée ; les personnages sont décrits, présentés ; un aspect de la vie athénienne est présenté, - les fêtes ; la place des vieillards ; le goût pour la discussion ; les sophistes. PLATON est écrivain des moeurs de son temps .B. d'être un vrai dialogue entre les protagonistes présents. Ce ne sera plus le cas pour les livres suivants de la République.
C. d'être un dialogue rapporté par SOCRATE lui - même. PLATON mime la méthode socratique par le recours au dialogue écrit. Cependant, le dialogue qui circonscrit dans le temps et dans l'espace est souvent délocalisé et intemporalisé (cf. le prologue du Phédon)
D. de présenter les différentes formes de savoir reconnues à son époque, et de les faire représenter par ceux qui comptent alors : les anciens, les poètes, les sophistes. La voix du philosophe se fait entendre parmi les autorités reconnues.
1. Le thème.
- 1. Il s'agit d'une introduction au livre dont il annonce le thème : la justice. Mais plus qu'une introduction, il avance et récuse les conceptions les plus communes au temps de PLATON, celles défendues par les autorités. Il s'agit donc d'un livre peirastique.
- 2. L'importance de la question : "(...) aussi bien n'est - il pas ici question d'une bagatelle, mais de ce qui doit faire la règle de notre vie" 352 d.
Voir aussi : "Crois - tu donc n'avoir entrepris de définir qu'une chose de peu d'importance, et non la règle de conduite que chacun doit suivre pour tirer de la vie le meilleur parti ?"344 e.
De même encore, la comparaison de la recherche de l'or : 336e.
2 Les personnages.
Par ordre d'apparition dans le dialogue, ce sont, pour les personnages qui interviennent dans le dialogue :
- 1. SOCRATE. Il rapporte les propos tenus. La République est un discours à la troisième personne. Il s'agit en réalité moins d'un dialogue que d'un enseignement de SOCRATE.
- 2. GLAUCON, frère de PLATON. Il est l'interlocuteur principal de SOCRATE dans la République.
- 3. POLEMARQUE, fils de CEPHALE. Il n'intervient que dans le livre I de la République.
- 4. ADIMANTE, frère aîné de PLATON. Il est l'un des interlocuteurs de SOCRATE dans la République.
- 5. CEPHALE, métèque, riche fabricant du PIREÉ, vieillard au moment du dialogue.
- 6. THRASYMAQUE de CHALCEDOINE (ville sur la rive asiatique du Bosphore, en face de Byzance), célèbre rhéteur de la deuxième moitié du 5ème siècle. Il n'apparaît que dans le livre I de la République, où il soutient une thèse sophistique, déjà tenue par CALLICLES dans le dialogue Gorgias17.
- 7. CLITOPHON, qui intervient en République, I, 340 a.
Les autres personnages sont des spectateurs muets : NICERATOS, fils du général NICIAS ; les autres fils de CEPHALE, LYSIAS et EUTHYDEME ; CHARMANTIDES.
3. Le plan du livre I de la République.
PROLOGUE. (326 a - 328 b). SOCRATE et GLAUCON sur le PIRÉE sont arrêtés par un serviteur de POLEMARQUE.
PREMIERE PARTIE. (328 b - 331 d). SOCRATE ET CEPHALE. L'opinion des honnêtes gens.
DEUXIEME PARTIE. (331 e - 336 a). SOCRATE et POLEMARQUE. L'opinion des poètes (SIMONIDE).
TROISIEME PARTIE. (336 b - 353 e). SOCRATE et THRASYMAQUE. L'opinion des sophistes et des rhéteurs.
1. La justice est l'intérêt du plus fort (338 c - 339 e).
Intermède 340 a - 340b.
2. La justice est l'intérêt vrai du plus fort (340 c - 342 e).3. La justice est l'avantage du plus fort (343 b - 348 b).
4.L'injustice est vertu (348 b - 354 a).
A. L'injustice est - elle une vertu ? (349 b - 350 c).
Intermède 350 c - e.
B. L'injustice est - elle plus forte que la justice ? (350 e352 c).
C. L'injuste est - il plus heureux que le juste ? (352 d - 354 a).
EPILOGUE. (354 a - 354 c).