"Les convictions sont des ennemis de la vérité plus dangereuses que les mensonges".

 

Notre époque aime le homme qui ont des convictions. Ne sont - ils pas ceux qui savent rester fermes et ne sont - ils pas ceux qui finissent par avoir raison envers et contre tout ? Les menteurs ne cherchent qu'à se protéger et à ménager leurs intérêts au détriment des autres. Comment les mensonges pourraient - ils moins dangereux pour la vérité que les convictions ? - ils sapent toute recherche de la vérité puisqu'ils s'efforcent à tout prix de la laisser dans l'ombre. Cependant, la conviction qui finit par avoir raison envers et contre tout ne défendrait - elle pas un intérêt plus secret et plus ennemi de la vérité en cherchant à avoir toujours raison envers et contre tous ?

 

I. Elles ne sont pas des ennemies de la vérité, - contrairement aux mensonges.

1. Les convictions sont sincères.

On est de bonne foi quand on est convaincu. En revanche le mensonge est déguisement de la vérité. Il y a de la mauvaise foi dans le mensonge.

2. Les convictions sont amies de la vérité.

Etre convaincu c'est être convaincu que l'on est dans le vrai. Mentir c'est au contraire savoir et être convaincu que l'on est dans le faux.

3. Les convictions veulent la vérité.

Les convictions admettent le débat. Le mensonge ne cherche que son intérêt.

Conclusion. Pourtant le débat que provoquent les convictions conduit plutôt la discussion que la dispute (décider par des preuves). Les convictions cherchent à avoir raison envers et contre tout et en dépit de tout.

Transition. Ne sont -elles pas plus ennemies de la vérité ?

 

II. Le danger des convictions.

1. Elles favorisent la discussion mais de ce fait elles empêchent l'écoute : chacun en reste à ses convictions. En cela elles peuvent être mensongères.

2. Elles empêchent tout progrès vers la connaissance de la vérité. Qui est convaincu de détenir la vérité ne la cherchera plus.

3. Elles favorisent l'intolérance. Qui est convaincu de détenir la vérité cherchera à l'imposer aux autres. La vérité est alors un enjeu ; une lutte oppose ceux qui prétendent la connaître.

Transition. Mais s'agit - il bien encore de convictions ?

 

III. Conviction, persuasion et mensonge.

Ces convictions sont plutôt des mensonges dont on est persuadé de bonne foi ou de mauvaise foi.

1. La conviction peut apporter des raisons ; la persuasion se fie à des impressions. La persuasion est alors une forme de mensonge envers soi - même : on refuse de s'avouer que l'on ne sait pas pourquoi on croit à ce que l'on croit. Or c'est la persuasion qui provoque les discussions.

2. La conviction parce qu'elle peut avancer des raisons permet de rester ferme sur ce que l'on sait être vrai (ce que l'on croit tel). La persuasion cherche l'approbation d'autrui et elle cherche l'adhésion d'autrui. On peut être convaincu seul ; on cherche à étendre ce dont on est seulement persuadé. Elle est une forme de mensonge envers les autres : tous les moyens seront bons. Or c'est la persuasion qui empêche tout progrès vers la connaissance de la vérité.

3. La conviction laisse du recul, la persuasion provoque à l'action. La persuasion cherche à rassembler des foules ; tous les moyens lui seront bons : le mensonge au premier chef. C'est elle qui est la cause de l'intolérance. La conviction parce qu'elle s'appuie sur des raisons laisse la tête froide.

 

Conclusion. Notre époque a peut - être raison d'aimer les hommes Qui ont des convictions, - à la condition cependant qu'il s'agisse bien de convictions : de thèses que l'on défend par des arguments et que l'on sait pouvoir être réfutés. Les convictions seront alors les meilleures amies de la vérité.

 

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